Six chercheurs examinent les activités de la FECRIS, et concluent qu’elles sont bien dangereuses pour la liberté de croyance.
Par Luigi Berzano (Université de Turin, Italie), Boris Falikov (Université d’état russe pour les sciences humaines, Moscou, Russie), Willy Fautré (Droits humains sans frontières, Bruxelles, Belgique), Liudmyla Filipovich (Département d’études religieuses, Institut de philosophie de l’Académie nationale des sciences, Kiev, Ukraine), Massimo Introvigne (Centre d’études sur les nouvelles religions, Turin, Italie), Bernadette Rigal-Cellard (Université Bordeaux Montaigne, Bordeaux, France)
Source : Bitter Winter
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- L’idéologie anti-sectes
En 2020, l’USCIRF (United States Commission on International Religious Freedom, (Commission des Etats-Unis sur la Liberté Religieuse dans le Monde), une commission bipartisane du gouvernement fédéral américain, a identifié l’idéologie anti-sectes comme une menace majeure pour la liberté religieuse internationale (USCIRF 2020).
L’idéologie anti-sectes est fondée sur l’idée que les « religions » et les « sectes » seraient différentes. Les « sectes », affirme-t-elle, ne sont pas des religions, même si elles peuvent faussement prétendre l’être. Alors que l’adhésion aux religions est libre, les « victimes » adhèrent à des « sectes » en raison des pratiques coercitives de ces dernières.
La terminologie internationale nécessite une clarification préliminaire. Le mot anglais péjoratif « cult » ne doit pas être traduit par « culte » en français, ni par des mots similaires dans d’autres langues. Ainsi que les spécialistes des religions l’ont remarqué depuis des décennies, le mot français ayant le même sens péjoratif que le mot anglais « cult » est « secte » plutôt que « culte ». « Cult » devrait être traduit par « secte » en français et à son tour « secte » devrait être traduit par « cult » – et non par « sect », qui n’a pas le même sens négatif (par exemple, les principales différentes écoles bouddhistes sont souvent appelées en anglais « Buddhist sects », sans jugement négatif implicite).
Dans sa forme organisée actuelle, l’idéologie anti-sectes est apparue à la fin des années 1960, mais ses origines sont beaucoup plus anciennes. Depuis des temps immémoriaux, les sociétés humaines ont considéré la religion comme quelque chose de positif et de nécessaire. Dans chaque société, ce que l’on entendait par « religion » était la religion dominante. Dans de nombreuses sociétés anciennes, cette religion existait sans concurrence. Lorsque la concurrence est apparue, la société a été confrontée à des problèmes à la fois culturels et de terminologie.
Nombreux sont ceux qui ont fini par croire que les religions nouvellement apparues, qui représentaient un défi pour la religion et la culture majoritaires, étaient si « étranges » que personne ne pouvait les embrasser librement. Les Romains pensaient que le christianisme était une superstition tellement absurde qu’elle ne pouvait être considérée comme une religion authentique, et que ceux qui s’y étaient convertis avaient été ensorcelés par des techniques de magie noire.
Les Romains n’étaient guère les seuls. En Chine, lors de son apparition, le bouddhisme a rencontré la même opposition que le christianisme à Rome. Il apparaissait comme une religion étrange autant que subversive avec son message d’égalité et de paix. Les mots xie jiao (enseignements hétérodoxes), utilisés aujourd’hui encore en Chine pour désigner les « sectes », ont été inventés au Moyen Âge pour désigner le bouddhisme. Ils ont ensuite été appliqués à un grand nombre de religions perçues comme hostiles au pouvoir impérial, dont le christianisme (Wu 2016). Leurs détracteurs estimaient qu’ils ne pouvaient gagner des convertis que par la magie noire, et ont énuméré un certain nombre de techniques par lesquelles les xie jiao étaient capables d’ensorceler leurs victimes pour les convertir (Wu 2017, 57-92).
En Occident, lorsque les chrétiens sont devenus une majorité soutenue par l’État, ils ont adopté la même explication pour la conversion à des croyances « hérétiques » telles que celles prêchées par les Vaudois, qui étaient à leur tour accusés d’ « ensorceler » leurs convertis (de Lange 2000, 49).
Après les Lumières, la croyance en la magie noire a décliné, mais l’idée que les religions étranges ne pouvaient être rejointes volontairement mais uniquement par le biais de l’ensorcellement fut sécularisée avec le concept d’hypnose. Les mormons, en particulier, étaient accusés d’hypnotiser leurs « victimes » pour les convertir (Ward 1855, 230).
L’anti-mormonisme a également introduit une autre revendication promise à un bel avenir, à savoir que les mouvements utilisant l’hypnose pour convertir leurs adeptes ne pouvaient être des religions authentiques. En 1877, dans un article paru dans le populaire Scribner’s Monthly, l’anti-mormon John Hanson Beadle (1840-1897) avouait que « les Américains n’ont qu’une seule religion indigène [le mormonisme] et celle-ci est la seule exception apparente à la règle américaine de tolérance universelle […]. Deux explications à cette anomalie sont proposées : l’une est que les Américains ne sont pas vraiment un peuple tolérant, et que ce qu’on appelle tolérance ne l’est qu’à l’égard de notre protestantisme commun, ou plus communément du christianisme ; l’autre est que quelque chose de particulier au mormonisme le fait sortir de la sphère de la religion. » (Beadle 1877, 391)
L’observation de Beadle prenait le lecteur en otage, le forçant à conclure que le mormonisme n’était pas une religion. Ce n’est qu’en affirmant que le mormonisme n’était pas « vraiment » une religion que l’image des États-Unis comme pays de la liberté religieuse pouvait se concilier avec la réalité américaine de la discrimination anti-Mormone.
Au XXe siècle, des idées que certains considéraient comme si « étranges » et dangereuses que personne ne pouvait les embrasser librement sont apparues dans un domaine différent de la religion, à savoir la politique. Les universitaires socialistes allemands, ne sachant comment expliquer que non seulement les bourgeois mais aussi les ouvriers et les pauvres pouvaient se convertir en masse au nazisme, parlèrent d’ « hypnose de masse » ou de « manipulation mentale ». Plus tard, avec la guerre froide, la même explication fut utilisée aux États-Unis pour expliquer pourquoi certains pouvaient embrasser une idéologie aussi absurde que le communisme (Anthony 1996).
Dans le cas du communisme, la Central Intelligence Agency (CIA) américaine, fondée en 1947, pensait avoir trouvé une preuve irréfutable dans les techniques utilisées dans les prisons communistes chinoises et nord-coréennes contre les missionnaires occidentaux arrêtés et, plus tard, contre les prisonniers de guerre américains capturés pendant la guerre de Corée. Des psychiatres et psychologues américains tels que Robert Jay Lifton et Edgar Schein furent invités à interroger les personnes libérées des prisons et camps communistes. Leurs conclusions étaient très prudentes, car ils avaient constaté qu’en fait les techniques chinoises n’avaient pas converti grand monde, et que la majorité de ceux qui avaient signé des déclarations d’allégeance au communisme l’avaient fait pour échapper à la torture ou aux mauvais traitements en prison, et n’avaient pas vraiment été persuadés (Lifton 1961 ; Schein, Schneier et Barker 1961). Ils furent critiqués pour leur approche psychanalytique et, dans le cas de Lifton, pour son idée libertaire de l’activité humaine qui le conduisit plus tard à soutenir le mouvement anti-sectes. Cependant, ils soutinrent que les techniques chinoises de manipulation mentale ne fonctionnaient que dans un nombre très limité de cas, lorsqu’elles étaient accompagnées par l’utilisation de drogues altérant l’esprit et par la torture, ou ne fonctionnaient pas du tout.
La CIA décida toutefois de présenter la thèse selon laquelle les gens ne se convertissaient pas librement au communisme avec des termes beaucoup plus simples, manichéens, en affirmant dans sa propagande que les communistes chinois et soviétiques avaient mis au point une technique infaillible pour changer les idées de leur victime « comme on change un disque [vinyle] sur un phonographe », comme l’expliqua le directeur de la CIA Allen Welsh Dulles (1893-1969) en 1953 (Dulles 1953).
La CIA chargea l’un de ses agents dont le métier de couverture était celui de journaliste, Edward Hunter (1902-1978), d’ « inventer » et de diffuser le mot « lavage de cerveau », en le présentant comme la traduction d’une expression prétendument utilisée par les communistes chinois (Hunter 1951). En fait, la CIA et Hunter avaient repris le concept de « lavage de cerveau » du roman 1984 de George Orwell (Eric Arthur Blair, 1903-1950), où Big Brother « nettoie » le cerveau des citoyens (Orwell 1949, 113) d’un régime fictif calqué sur la Russie soviétique.
Paradoxalement, la CIA en vint à croire en sa propre propagande et tenta de reproduire le lavage de cerveau communiste dans le cadre d’expériences menées en grande partie au Canada (car elles auraient été illégales aux États-Unis) par le psychiatre Donald Ewen Cameron (1901-1967), qui furent connues sous le nom du tristement célèbre projet MK-Ultra. Par le biais d’électrochocs, de drogues lourdes et de privation de sommeil, Cameron tentait de « laver » le cerveau de ses victimes en les débarrassant de leurs idées et habitudes antérieures et en leur en inculquant de nouvelles. Comme il l’admit, il n’avait réussi qu’à créer des « légumes » et des « zombies » et dans les procès qui suivirent, la CIA dut payer de lourds dommages et intérêts aux victimes – ou à leurs proches, puisque certaines d’entre elles étaient mortes. Mais personne ne fut « converti » à de nouvelles croyances (Marks 1979).
Mais comment l’accusation de pratiquer le lavage de cerveau est-elle passée des communistes aux « sectes » ? Le premier auteur qui appliqua la rhétorique de la CIA sur le lavage de cerveau à la religion est le psychiatre anglais William Walters Sargant (1907-1988) dans son livre The Battle for the Mind : A Physiology of Conversion and Brainwashing (La Bataille de l’esprit : une physiologie de la conversion et du lavage de cerveau) (Sargant 1957), qui devint un best-seller international. Sargant ne croyait pas qu’il y avait une différence entre les religions traditionnelles, qui n’auraient pas utilisé la manipulation mentale, et les « sectes », qui l’auraient fait. Au contraire, Sargant était résolument anti-chrétien, et mentionnait les catholiques romains et les méthodistes comme deux groupes utilisant typiquement le lavage de cerveau, et accusait les premiers chrétiens du même péché (Sargant 1957, 121). Le psychiatre anglais pensait que seul le lavage de cerveau pouvait expliquer la croissance rapide du christianisme primitif.
Beaucoup de gens ont lu le livre de Sargant et ce dernier a certainement alimenté une attitude hostile à l’égard de la religion en général. Cependant, sa cible était trop large pour que le livre soit d’une quelconque utilité pour promouvoir des politiques publiques. C’est aux États-Unis qu’une poignée de psychologues retravaillèrent les idées de Sargant en affirmant que toutes les religions ne recouraient pas au lavage de cerveau, mais seulement certaines d’entre elles, nouvellement fondées, qui n’étaient pas exactement des religions mais des « sectes ». Cela se produisit dans le climat des années 1960 et du début des années 1970, alors que le mouvement anti-sectes venait de naître, principalement parmi des parents d’étudiants qui avaient décidé d’abandonner leurs universités pour devenir missionnaires à plein temps pour l’Église de l’Unification ou les Enfants de Dieu, ou moines hindous rasés du mouvement Hare Krishna. Une fois de plus, leurs parents ne croyaient pas que leurs choix puissent avoir été volontaires, et des psychologues comme Margaret Thaler Singer (1921-2003) leur proposèrent le lavage de cerveau comme une commode explication. Le lavage de cerveau justifiait également la pratique illégale de la déprogrammation, créée par Ted Patrick en Californie. Si leurs fils et leurs filles avaient subi un lavage de cerveau, ces parents se sentaient justifiés d’engager des « déprogrammeurs » qui prétendaient être capables de kidnapper les « sectaires », de les détenir et de les persuader, plus ou moins violemment, d’abandonner les « sectes » (Shupe et Bromley 1980).
Durant ces mêmes années, l’étude académique des nouveaux mouvements religieux est née, tant aux États-Unis qu’au Royaume-Uni. Les chercheurs qui ont alors étudié les mouvements critiqués comme étant des « sectes » constatèrent que la conversion à ces mouvements se passait à peu près de la même manière que la conversion à n’importe quelle autre religion, et que seul un petit pourcentage de ceux qui assistaient aux cours et aux séminaires de groupes comme l’Église de l’Unification, où des techniques de lavage de cerveau prétendument miraculeuses auraient été utilisées, rejoignaient ces mouvements (Barker 1984). Les preuves empiriques ont confirmé l’absence de lavage de cerveau ou de manipulation mentale, et ces étiquettes et théories se sont révélées n’être pas moins pseudo-scientifiques que les anciennes affirmations selon lesquelles les « hérésies » convertissaient leurs adeptes par la magie noire (Richardson 1978).
Les chercheurs réussirent à marginaliser l’utilisation du mot « secte » et les théories de lavage de cerveau dans la communauté universitaire, mais la controverse se déplaça vers les tribunaux. La déprogrammation était devenue une profession très lucrative, et une couverture pour d’autres activités illégales (Shupe et Darnell 2006), certains cabinets d’avocats pensaient que les anciens membres pouvaient poursuivre les nouveaux mouvements religieux en réclamant des dommages et intérêts pour lavage de cerveau ; ainsi des intérêts financiers importants étaient entrés en jeu.
Il fallut une bonne décennie pour que l’opinion majoritaire des chercheurs selon laquelle le lavage de cerveau et la manipulation mentale étaient des théories pseudo-scientifiques, s’impose dans les tribunaux. L’affrontement décisif se produisit devant le Tribunal de District américain du District Nord de Californie en 1990, dans l’affaire Fishman. Steven Fishman était un « fauteur de troubles professionnel » qui assistait aux assemblées des actionnaires de grandes sociétés dans le but de poursuivre la direction avec le soutien d’autres actionnaires minoritaires. Il signait ensuite des accords et empochait l’argent versé par les sociétés, laissant les autres actionnaires qui lui avaient fait confiance les mains vides. Dans un procès intenté contre lui pour fraude, Fishman affirma pour sa défense qu’à l’époque, il était temporairement incapable de comprendre ou d’avoir des jugements sains, parce qu’il était membre de l’Église de Scientology depuis 1979, et qu’à ce titre, il avait subi un lavage de cerveau. La Scientology ne faisait pas partie du procès et n’avait rien à voir avec les méfaits de Fishman (bien que des années plus tard, Fishman ait faussement prétendu le contraire).
Après avoir examiné en détail les documents relatifs au débat des chercheurs sur le lavage de cerveau, le juge S. Lowell Jensen conclut que le lavage de cerveau et la manipulation mentale « ne représentaient pas des concepts scientifiques significatifs » et que bien que défendus par une infime minorité d’universitaires, ils avaient été rejetés comme pseudo scientifiques par une majorité écrasante d’universitaires étudiant les nouveaux mouvements religieux. Le témoignage de Margaret Singer fut déclaré non recevable et Fishman alla en prison (United States District Court for the Northern District of California 1990).
Fishman marqua le début de la fin de l’utilisation des théories anti-sectes de lavage de cerveau dans les tribunaux américains. Pour les anti-sectes, le pire était à venir en 1995, lorsque le déprogrammeur Rick Ross fut impliqué dans un procès civil après avoir tenté sans succès de déprogrammer Jason Scott, un membre de l’Église Pentecôtiste Unie, une importante église chrétienne forte de 5 millions de personnes que peu de gens considèrent comme une « secte » ou un nouveau mouvement religieux. Scott fut soutenu par des avocats et des détectives de la Scientology, qui prouvèrent que sa mère avait été envoyée à Ross par le Cult Awareness Network (CAN) (Réseau de Vigilance sur les Sectes), le plus grand mouvement anti-sectes américain à l’époque. Le CAN fut condamné à payer des millions de dollars de dommages et intérêts (United States Court of Appeals for the Ninth Circuit 1998) et fit faillite. Le nom et les actifs du CAN furent rachetés par un groupe lié à la Scientology, qui a permis au sociologue Anson D. Shupe (1948-2015) et à son équipe d’accéder librement aux archives du CAN. Ils découvrirent que la pratique de l’ancien CAN consistant à envoyer les parents des membres d’une « secte » à des déprogrammeurs n’était pas occasionnelle mais habituelle. En retour, les « déprogrammeurs » reversaient à l’ « ancien » CAN des commissions importantes (et probablement illégales) (Shupe et Darnell 2006).
La décision Fishman et Scott n’élimina pas totalement l’utilisation des arguments de lavage de cerveau et de manipulation mentale auprès des tribunaux américains, mais ils devinrent rares et se produisirent principalement en dehors du domaine de la religion, dans les litiges familiaux liés à la théorie controversée du syndrome d’aliénation parentale (PAS, parental alienation syndrome) (Reichert, Richardson, et Thomas 2015). Mais l’idée que les « sectes » pratiquaient la manipulation mentale ou le lavage de cerveau a survécu dans les médias populaires américains. Elle a également survécu en dehors des États-Unis, particulièrement en France. Cependant, les arguments formulés par une grande majorité des principaux spécialistes des nouveaux mouvements religieux, et mentionnés dans la décision Fishman, ne concernent pas uniquement les États-Unis. Le lavage de cerveau et la manipulation mentale restent des concepts rejetés comme pseudo scientifiques par une grande majorité des spécialistes des religions.
Comme l’a soutenu l’universitaire chinois Wu Junqing en comparant les accusations médiévales contre le Bouddhisme et les campagnes contemporaines contre le Falun Gong en Chine, les accusations de lavage de cerveau sont dans la continuité de l’ancienne théorie selon laquelle les religions hétérodoxes « ensorcelaient » leurs « victimes » par des sortilèges magiques (Wu 2017, 156-57). Bien que présenté (faussement) comme scientifique, le lavage de cerveau est une version sécularisée de la théorie selon laquelle les religions maléfiques peuvent ensorceler leurs membres potentiels, vaincre leur libre arbitre et les contraindre à se convertir par des techniques magiques (Wu 2017, 157). James T. Richardson en est arrivé à des conclusions similaires concernant les théories de « lavage de cerveau » avancées par les anti-sectes en Occident : elles sont étonnamment similaires aux affirmations médiévales et du début des temps modernes selon lesquelles les hérésies utilisaient la magie noire pour gagner de nouveaux adeptes. Seul le langage a été modernisé (Kilbourne et Richardson 1986).
La théorie pseudo-scientifique du lavage de cerveau (parfois appelé contrôle mental ou manipulation mentale par ceux qui veulent éviter les associations historiques embarrassantes avec un mot inventé par la CIA) est la pierre angulaire de l’idéologie anti-sectes. Les « sectes » sont accusées d’autres méfaits, comme l’enrichissement des dirigeants aux dépens des adeptes, la séparation des familles, le harcèlement des critiques et les anciens membres, etc. Cependant, ces accusations sont secondaires à celle, principale, de lavage de cerveau. Les membres commettent des actes nuisibles pour eux-mêmes et pour les autres et obéissent aux dirigeants avant d’avoir subi un lavage de cerveau. Et c’est également de cette manière que l’idéologie anti-sectes prétend pouvoir distinguer les « sectes » des religions. Les « sectes » pratiqueraient le lavage de cerveau, alors que les religions utiliseraient des techniques légitimes de persuasion.
L’une des raisons pour lesquelles l’idéologie anti-sectes du lavage de cerveau fut rejetée par une écrasante majorité des universitaires spécialistes des religions est qu’elle est fondée sur une fraude. Les anti-sectes prétendent ne s’intéresser qu’aux actes, non aux croyances. « Nous ne portons jamais de jugement sur les croyances », répètent-ils. Ce n’est pourtant pas vrai. Lorsqu’il a appliqué pour la première fois les théories politiques du lavage de cerveau à la religion, William Sargant (un nom bien plus important dans l’histoire de la psychiatrie que les praticiens de la santé mentale qui ont rejoint plus tard le mouvement anti-sectes) avait déjà averti qu’il était vain de distinguer les religions des « sectes » s’agissant du lavage de cerveau. Il affirmait que le lavage de cerveau était utilisé « à tout moment de la longue histoire religieuse de l’homme » (Sargant 1971, 25), des anciennes religions romaine et grecque au christianisme, à l’islam et au-delà. Le récit de la conversion soudaine de l’Apôtre Paul au christianisme fut interprété par Sargant comme une preuve évidente qu’il avait subi un lavage de cerveau de la part du chrétien Ananie (Sargant 1957, 121).
En lisant la littérature anti-sectes, nous rencontrons à maintes reprises des preuves que les anti-sectes, sans l’avouer, s’intéressent beaucoup aux crédos et pas seulement aux actes. En fait, la version « secte » du lavage de cerveau n’est appliquée qu’aux groupes dont les croyances sont considérées comme bizarres, ridicules, odieuses ou inacceptables par les anti-sectes. L’engagement intense, la dévotion au leader (qui peut être considéré comme une incarnation vivante du divin), les demandes de dons importants, sont autant d’éléments que l’on retrouve dans des groupes de longue tradition que les anti-sectes n’incluent pas dans leurs listes de « sectes » (le Dalaï Lama est considéré comme un Bouddha vivant, mais le bouddhisme tibétain n’est généralement pas qualifié de « secte », sauf par certains anti-sectes extrêmes). La raison pour laquelle un groupe est qualifié de « secte » et un autre mouvement similaire échappe à cette étiquette n’est jamais vraiment expliquée. Et l’étiquetage est appliqué parce que certaines doctrines apparaissent comme inacceptables aux yeux des anti-sectes, en fonction de leurs propres préjugés.
- Le cas de la FECRIS
Comme nous l’avons déjà mentionné, le mouvement anti-sectes a été créé aux États-Unis par des parents mécontents du fait que leurs enfants avaient rejoint de nouveaux mouvements religieux en tant que membres à plein temps ou missionnaires, renonçant ainsi aux perspectives d’une carrière dans le monde. Dans certains pays européens, les origines du mouvement anti-sectes furent similaires. L’ADFI française (Association pour la Défense de la Famille et de l’Individu, plus tard UNADFI) fut créée en 1974 par les Champollion, un couple dont le fils avait rejoint l’Eglise de l’Unification. Un autre mouvement anti-sectes français, le CCMM (Centre de Documentation, d’Education et d’Action contre les Manipulations Mentales) fut fondé en 1981 par Roger Ikor (1912-1986), un écrivain dont le fils avait rejoint le Zen Macrobiotique et s’était par la suite suicidé (Duval 2012). Bien qu’aucun lien entre l’affiliation du plus jeune Ikor au Zen Macrobiotique et son suicide n’ait été prouvé, l’écrivain affirma qu’une « secte » avait « assassiné » son fils (Ikor 1981, 36).
En Autriche, Friedrich Griess, un ingénieur devenu un éminent anti-sectes autrichien et européen, avait été initialement motivé par le fait que sa fille avait rejoint l’Eglise chrétienne de Brunstad, une église évangélique établie en Norvège par Johan Oscar Smith (1871-1943) (Brünner et Neger 2012). Le conflit entre Griess et sa fille semble être la principale raison pour laquelle l’Eglise chrétienne de Brunstad est devenue un élément important des controverses européennes sur les « sectes ».
De la même manière que cela s’était produit aux États-Unis, les parents ont rapidement été remplacés par des professionnels tels que des avocats, des psychologues et des psychiatres comme voix les plus visibles du mouvement anti-sectes en Europe. En 1994, des associations anti-sectes avaient été fondées dans la plupart des pays européens, et une organisation faîtière fut créée à Paris, la FECRIS (Fédération Européenne des Centres de Recherche et d’Information sur le Sectarisme), dont le bureau se trouvait à l’origine à l’adresse de l’UNADFI dans la capitale française. Elle regroupe aujourd’hui des associations, grandes et petites, dans plus de 30 pays, dont certains hors d’Europe.
En 1993, le chercheur italien Massimo Introvigne introduisit une distinction entre un mouvement religieux « contre les sectes » et un mouvement laïque « anti-sectes », qui a été largement adoptée depuis (Introvigne 1993). Le mouvement contre les sectes a commencé au début du 19ème siècle, lorsque des théologiens protestants et plus tard des catholiques Romains critiquèrent systématiquement ce qu’ils considéraient comme des « sectes » hérétiques s’écartant de l’orthodoxie chrétienne. Ce mouvement a continué au 20ème siècle et est toujours actif aujourd’hui. Les activistes « contre les sectes » s’intéressent surtout aux doctrines qu’ils identifient comme hérétiques, et veulent ramener les « sectaires » dans le giron de l’orthodoxie chrétienne. Ils peuvent être réticents à s’appuyer sur les théories du lavage de cerveau, car ils savent qu’elles ont également été utilisées pour critiquer des groupes chrétiens. Les anti-sectes, quant à eux, affirment qu’ils ne s’intéressent pas aux doctrines et veulent simplement libérer les « sectaires » des « sectes » qui leur ont fait subir un lavage de cerveau, plutôt que de les convertir à une quelconque église chrétienne.
Un trait distinctif des anti-sectes européens et de la FECRIS est la coopération entre les « anti-sectes » laïques, dont certains promeuvent ouvertement l’athéisme et les activistes religieux « contre les sectes ». Cette coopération semble être contradictoire et a généré certaines tensions, mais elle explique aussi comment la FECRIS a pu influencer des politiciens, des gouvernements et des médias d’orientations religieuses et non religieuses très différentes.
Les organisations françaises affiliées à la FECRIS offrent une étude de cas intéressante. Roger Ikor était un athée autoproclamé. En 1980, il déclarait qu’ « il n’y a pas entre une secte et une religion de différence de nature, ou plutôt de principe ; il n’y a qu’une différence de degré et de dimensions… Si nous nous écoutions, nous mettrions un terme à toutes ces billevesées, celles des sectes, mais aussi celles des grandes religions ». Il citait également « Mahomet, le Christ et Moïse » comme précurseurs des chefs de sectes actifs aujourd’hui (Ikor 1980, 76, 87, 89).
D’un autre côté, l’ADFI/UNADFI, du moins dans ses premières années, comprenait de nombreux catholiques et fut accueillie pendant plusieurs années dans une paroisse catholique de Paris (Notre Dame de Lorette). Cependant, quelque chose changea au 21ème siècle. Janine Tavernier, qui fut présidente de l’UNADFI de 1993 à 2001 et quitta l’association en 2001, a déclaré au Monde en 2006 que l’UNADFI « a été fondée par des personnes d’origine catholique, mais ouvertes. J’ai souhaité qu’on aille vers davantage d’ouverture. Petit à petit, beaucoup de francs-maçons sont entrés dans l’Unadfi, lui donnant une coloration qu’elle n’avait pas à l’origine » Finalement, l’UNADFI s’est engagée dans une « chasse aux sorcières » contre des groupes qui, selon Tavernier, n’avaient rien à voir avec les « sectes » mais étaient attaqués pour des raisons idéologiques ou politiques (Ternisien 2006). Dans les mêmes années, elle écrit qu’elle a « été choquée un jour lorsque j’ai entendu une personne très impliquée dans la lutte contre les sectes dire avec beaucoup de conviction : “Il faut éradiquer l’idée de Dieu” » (Tavernier 2006, 7).
Tavernier fait référence à l’orientation anticatholique bien connue de la plus grande organisation maçonnique française, le Grand Orient. En 2009, le sociologue Olivier Bobineau nota également au sein des anti-sectes français, la coexistence d’un « un pôle conservateur catholique, qui désigne le mal selon ses propres critères, et un pôle de gauche athée pour qui le mal, c’est la liberté de conscience ». Les deux groupes « ne s’accordent que dans la désignation d’ennemis communs, les mouvements présentés comme sectaires ». En 2009, selon Bobineau, le groupe athée l’a emporté dans ce « rapport de force » (Albertini 2009).
La coexistence difficile entre une composante « anti-sectes » et une composante « contre les sectes » se poursuit à la FECRIS. Les intellectuels laïques et les libres penseurs tels que les dirigeants du CCMM ne semblent pas avoir d’objections à faire partie d’une organisation qui a élu comme vice-président Alexander Dvorkin, un employé de l’Église Orthodoxe Russe. Dvorkin est un exemple particulièrement flagrant d’un dirigeant de la FECRIS critiquant les crédos des religions qu’il n’aime pas, mais il existe d’autres cas en Serbie (Janković 2012) et même en France (Duval 2012).
Dans les pays post-communistes, les communistes et les Églises orthodoxes, toutes deux des institutions conservatrices à leur manière, se sont opposés au libre choix politique et culturel des temps nouveaux et ont utilisé des mouvements anti-sectes (et les ont financés) pour combattre des concurrents indésirables, qui sont apparus dans les domaines idéologique et religieux.
Parmi les correspondants non européens de la FECRIS se trouve le Centre israélien pour les victimes des cultes (ICVC), qui (comme l’organisation de Dvorkin) est prétendument laïc mais, tout en incluant également des humanistes laïcs, a des liens étroits avec des institutions juives ultra-conservatrices qui sont principalement intéressées à empêcher les Juifs de se convertir à d’autres religions. En 2018, un rapport de Droits humains sans frontières a exposé les liens d’ICVC avec Yad L’Achim, une organisation officiellement dénoncée par le Département d’État américain (United States Department of State 2017) comme une expression radicale du judaïsme ultra-orthodoxe, qui promeut la discrimination contre les minorités religieuses en Israël et la violence à leur encontre. Le rapport a également mis en évidence le soutien de Yad L’Achim au gouvernement chinois dans sa persécution du Falun Gong (Human Rights Without Frontiers 2018).
Dvorkin, d’ailleurs, qui est l’un des leaders les plus visibles de la FECRIS au niveau international, a également offensé les croyants de religions historiques. Il créa des problèmes considérables dans les relations entre la Russie et l’Inde en attaquant la Bhagavad-Gita comme un livre « extrémiste » et en déclarant que « nous ne nous tromperons pas si nous disons que, du point de vue orthodoxe, Krishna est l’un des démons » (CAP-LC 2014, 13). Il a qualifié l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, également connue sous le nom d’Église mormone, de « secte occulte néopaïenne grossière avec des tendances totalitaires assez sérieuses » (Dvorkin 2002, 146), Quant au Prophète de l’islam, Dvorkin a affirmé que « soit Mahomet souffrait d’une maladie et c’était une vision délirante ; soit il s’agissait d’une obsession démoniaque ; ou bien, de nouveau, les pères byzantins ont affirmé qu’il était une sorte de fantaisiste ayant tout inventé et qu’ensuite ses proches y ont cru, ce à quoi il ne s’attendait pas. Mais bien sûr, les combinaisons des trois sont également possibles » (ce qui généra une forte réaction des instances musulmanes : voir Golosislama.com 2012).
Cette coexistence entre éléments « contre les sectes » et « anti-sectes » au sein de la FECRIS explique quels groupes sont désignés comme « sectes » et accusés de « lavage de cerveau ». D’une part, il y a les églises traditionnelles, telle que l’Eglise Orthodoxe Russe de Dvorkin, qui considèrent comme des concurrents et des « voleurs de moutons » les religions qui convertissent leurs membres. D’autre part, les mouvements à fort engagement qui réussissent à s’imposer dans une société sécularisée dérangent ces humanistes séculiers et ces militants antireligieux dont la présence, selon Tavernier, était devenue si importante dans le milieu. On a cependant l’impression que le critère permettant de désigner un groupe comme « secte » et de laisser un autre tranquille est grandement capricieux. Les affiliés de la FECRIS prétendent opérer sur la base des plaintes reçues par des parents de membres ou d’ex-membres. Indiscutablement, cette méthode est ouverte à toutes sortes de manipulations : n’importe quelle personne n’aimant pas un groupe peut réussir à faire envoyer deux ou trois plaintes aux associations de la FECRIS, qui s’empresseront de déclarer le groupe « secte » et d’affirmer qu’il recourt au lavage de cerveau. En suivant les comptes de médias sociaux des affiliés de la FECRIS, nous sommes également impressionnés par la rapidité avec laquelle, lorsque les médias rapportent qu’un leader de mouvement religieux a été accusé d’abus sexuels ou financiers, les anti-sectes, ne connaissant rien de précis sur le groupe, confirment immédiatement que oui, il s’agit d’une « secte typique » qui utilise le lavage de cerveau sur ses membres.
La FECRIS et ses affiliés sont le principal relais pour diffuser l’idéologie anti-sectes en Europe. Depuis que la FECRIS a obtenu le statut participatif auprès du Conseil de l’Europe en 2005 et le statut consultatif spécial auprès de l’ECOSOC (Conseil Economique et Social) des Nations Unies en 2009, elle est également en mesure de diffuser la même idéologie dans les forums internationaux même si ses efforts sont vigoureusement combattus et dénoncés par d’autres ONG accréditées.
Comme l’USCIRF l’a déclaré en 2020, la FECRIS représente un danger pour la liberté religieuse (USCIRF 2020). Nous allons énumérer plusieurs raisons pour lesquelles ses activités causent des dommages.
- La FECRIS diffuse systématiquement l’idéologie anti-sectes sur les « sectes » et le lavage de cerveau, une théorie pseudo-scientifique qui prétend faussement faire la distinction entre les actes et les croyances mais qui en fait, accuse du crime imaginaire de lavage de cerveau, ou de manipulation mentale, les organisations religieuses que, pour une quelconque raison, les membres de la FECRIS n’aiment pas.
- La FECRIS diffuse de fausses informations sur des dizaines, voire des centaines de religions et de mouvements religieux, que certains médias et gouvernements prennent au sérieux et utilisent puisque les membres de la FECRIS sont prétendument des « experts » en la matière. Des spécialistes internationaux ont mis en évidence certains exemples flagrants de cette façon de procéder. En Serbie, Zoran Luković, un capitaine de police et représentant du Centre d’Etudes Anthropologiques affilié à la FECRIS locale, a déclaré publiquement que deux homicides commis en 2007 par un fou (dont le tribunal a estimé qu’il n’avait aucun lien avec une quelconque « secte ») étaient clairement « calqués sur les rituels satanistes du comte Dracula » (Janković 2012, 371). Ni le Dracula historique ni le Dracula fictif du roman de Bram Stoker (1847-1912) n’étaient des satanistes. Le même Luković a écrit un manuel sur les « sectes » où il a répertorié parmi les « sectes satanistes » aussi bien Heaven’s Gate que le Peoples Temple de Jim Jones (Janković 2012, 366), qui ont terminé leur histoire par des suicides collectifs mais dont l’idéologie n’avait rien à voir avec le satanisme. Les fausses affirmations de Dvorkin sur les différentes religions nouvelles et anciennes pourraient faire l’objet d’un livre entier.
Les spécialistes des nouveaux mouvements religieux ne sont pas les seuls à penser que les organisations affiliées à la FECRIS, leurs dirigeants et la FECRIS elle-même ont diffusé des informations fausses et diffamatoires sur plusieurs groupes religieux. Cela a également été confirmé par des décisions de justice. Les avocats savent que les affaires de diffamation sont difficiles. Toutes les fausses déclarations ne constituent pas une diffamation. Certaines déclarations peuvent être inexactes, mais les tribunaux peuvent considérer qu’elles sont protégées par la liberté d’expression et qu’elles ne tombent pas sous le coup des lois contre la diffamation. Les organisations et les tabloïdes qui recourent à la diffamation systématique savent qu’ils seront souvent poursuivis pour plusieurs déclarations, et qu’ils seront condamnés pour certaines et déclarés non coupables pour d’autres. Leur stratégie consiste normalement à minimiser les décisions négatives et à crier victoire lorsque seules certaines des déclarations pour lesquelles ils étaient poursuivis, mais pas toutes, sont jugées diffamatoires (ce qui arrive fréquemment, même dans les affaires de diffamation les plus réussies). Ils peuvent également prétendre à tort que parce que leurs déclarations ont été jugées non diffamatoires, les tribunaux ont « certifié » qu’elles sont « vraies » – alors qu’en fait une déclaration peut être à la fois fausse et hors du champ de la diffamation.
Cette stratégie a été utilisée pour minimiser la portée d’une décision historique du Tribunal de District de Hambourg du 27 novembre 2020, qui a déclaré la FECRIS elle-même et non ses seuls affiliés, coupable de 18 chefs d’accusation d’ « allégations factuelles mensongères contre les Témoins de Jéhovah ». (Landgericht Hamburg 2020). Les Témoins de Jéhovah avaient affirmé que 32 déclarations de la FECRIS étaient diffamatoires ; le tribunal en a jugé 17 diffamatoires, une partiellement diffamatoire et 14 non diffamatoires. La FECRIS a alors affirmé dans un communiqué de presse – publié seulement après que Massimo Introvigne a examiné la décision de Hambourg dans un magazine à grand tirage sur la liberté religieuse (Introvigne 2021), alors qu’auparavant la FECRIS avait gardé le silence sur la question – qu’elle avait « gagné » le procès allemand. De toute évidence, ce n’était pas le cas, comme en témoigne le fait que la FECRIS ait été condamnée à verser de l’argent aux Témoins de Jéhovah et non l’inverse, mais elle affirma que les 14 déclarations déclarées non diffamatoires étaient « essentielles » et que les 18 points pour lesquels elle était condamnée étaient « accessoires » (FECRIS 2021).
Le communiqué de presse de la FECRIS donnait également la fausse impression que le Tribunal de Hambourg avait validé comme vraies les 14 déclarations qu’il avait considérées comme non diffamatoires. En fait, la Cour elle-même avait mis en garde contre une telle interprétation, notant qu’en droit allemand « les expressions d’opinion bénéficient d’une protection étendue. En conséquence, les opinions inexactes bénéficient également de cette protection ». Une bonne illustration d’ « opinion inexacte » considérée comme non diffamatoire que la FECRIS mentionne dans sa déclaration comme si elle avait été confirmée comme vraie par les juges de Hambourg, est que « toutes les allégations de persécution des Témoins de Jéhovah en Russie ne sont que de la propagande primitive ». Nous nous demandons même si la FECRIS croit réellement à la véracité de cette déclaration, alors même que la persécution des Témoins de Jéhovah en Russie a été dénoncée de façon répétée par les Nations unies, l’Union européenne et plusieurs gouvernements occidentaux.
En Autriche, l’obsession déjà mentionnée de l’anti-sectes Friedrich Griess lié à la FECRIS, contre l’église chrétienne de Brunstad a donné lieu à plusieurs procès que Griess a réglés par l’engagement répété de ne plus faire de déclarations diffamatoires contre l’Eglise. Il a par la suite recommencé et a été de nouveau poursuivi en justice (Brünner et Neger 2012, 323-28).
En France, la Cour d’appel de Rouen a condamné la présidente de l’UNADFI, Catherine Picard, pour diffamation envers les Témoins de Jéhovah à travers ce que la Cour a appelé « une présentation fallacieuse » de leur organisation. La décision a ensuite été annulée pour vice de procédure (Mme Picard n’a pas été convoquée en temps voulu pour le procès en appel) par la Cour de cassation, qui n’a toutefois pas contredit la conclusion substantielle de la Cour d’appel. En 2007, la même Cour de cassation avait considéré comme diffamatoires les déclarations de Mme Picard contre le mouvement Rosicrucien AMORC (Duval 2012, 251-52).
Des dirigeants locaux de l’ADFI/UNADFI ont également été condamnés. En 1997, la Cour d’appel de Douai a déclaré Lydwine Ovigneur, alors présidente de l’ADFI-Nord, coupable de diffamation à l’encontre des Témoins de Jéhovah (Forget 2010, 141). Une autre présidente de l’ADFI-Nord, Charline Delporte, avait été reconnue non coupable de diffamation à l’encontre des mêmes Témoins de Jéhovah, mais l’affaire fut renvoyée par la Cour de cassation pour réexamen devant la Cour d’appel de Paris, qui conclut en 2003 que Delporte avait effectivement diffamé l’organisation religieuse (Forget 2010, 141-43).
La Scientology a également gagné plusieurs procès contre des dirigeants de l’UNADFI (Fautré 2021). Le 20 novembre 2001, le Tribunal correctionnel de Paris a condamné la présidente de l’UNADFI, pour diffamation publique concernant un membre de l’Église de Scientology. Le 5 février 2003, la Cour d’appel de Paris a confirmé ce jugement. Le 20 novembre 2015, l’UNADFI a été condamnée par la Cour d’appel de Paris pour « abus de procédure judiciaire », pour s’être jointe et avoir persisté illégalement et de mauvaise foi à se constituer partie civile contre l’Église de Scientology, alors que l’UNADFI savait parfaitement que cette action était irrecevable, son seul but étant de nuire à l’Église et d’influencer illégalement la procédure judiciaire en cours (Cour d’Appel de Paris 2015). Cette condamnation a été confirmée par la Cour de cassation le 12 janvier 2017.
En Allemagne, Heide-Marie Cammans, la fondatrice de Sekten-Info Essen (devenu Sekten-Info NRW e.V.), affiliée à la FECRIS, fut condamnée à Munich en 2001 pour avoir diffusé de fausses informations sur le groupe de Sant Thakar Singh (1929-2005), un maître spirituel de la tradition Sant Mat (Dericquebourg 2012, 191).
En 2018, même le Tribunal d’Odintsovo en Russie, un pays où le pouvoir judiciaire coopère normalement avec les anti-sectes, a estimé que l’organisation de Dvorkin, affiliée russe de la FECRIS, était allé trop loin et l’a condamnée à retirer ses déclarations diffamatoires contre le maître spirituel Hindou Prasun Prakash (Matharu 2019).
Ce ne sont là que quelques exemples de procès perdus par des affiliés de la FECRIS. Sans nul doute, ces organisations anti-sectes peuvent également mentionner avoir gagné des procès contre de nouveaux mouvements religieux, qui les comparaient à la Gestapo nazie ou utilisaient un langage dépassant les limites de la liberté d’expression, et que dans d’autres cas leurs déclarations ont été considérées comme non diffamatoires.
Cependant, il n’y a pas de véritable équilibre ici. La FECRIS cherche à jouer un rôle public. Elle prétend fournir une expertise fiable sur les « sectes » et proposer des services d’ « experts ». Dans de nombreux cas à travers l’Europe, ces « experts » ont été jugés par les tribunaux comme offrant non pas des rapports factuels, mais des informations fallacieuses et des calomnies, dans le but délibéré de diffamer et de discriminer les mouvements religieux qu’ils n’aiment pas. Le nombre de cas conduit clairement à la conclusion qu’il s’agit d’un comportement systématique, plutôt qu’occasionnel, de la FECRIS et de ses affiliés.
- La FECRIS soutient des régimes totalitaires qui ont encouru la condamnation du monde entier pour leurs persécutions, leurs tortures et leurs exécutions extrajudiciaires de membres de religions minoritaires. Alexander Dvorkin, le principal architecte de la persécution russe des nouveaux mouvements religieux, a été élu vice-président de la FECRIS et constitue un moteur principal de l’organisation. Pire encore, des membres de la FECRIS (Dericquebourg 2012, 193), dont Dvorkin (Human Rights Without Frontiers Correspondent in Russia 2012, 284) ont participé à des conférences organisées en Chine pour justifier la persécution du Falun Gong. Dvorkin a déclaré que « le Falun Gong est une secte totalitaire coriace dont les membres sont utilisés par son chef dans sa vendetta contre le gouvernement chinois et qui, à son tour, est utilisée par les services spéciaux américains pour leurs objectifs de politique étrangère » (Dvorkin 2013).
Alors que le monde démocratique est engagé dans une lutte pour dénoncer la persécution du Falun Gong en Chine, avec des dizaines de documents gouvernementaux et internationaux mentionnant la torture, les meurtres et les prélèvements d’organes, le soutien des dirigeants de la FECRIS est une arme précieuse que le Parti communiste chinois peut utiliser, et utilise en fait, pour justifier ses atrocités.
- La FECRIS a été impliquée dans des actes violents contre les nouveaux mouvements religieux. Ce n’est pas seulement que les discours de haine finissent généralement par générer de la violence physique. Bien que prudents à l’égard de la déprogrammation qui a conduit à la fin du Cult Awareness Network aux États-Unis, les dirigeants de la FECRIS l’ont parfois justifiée (Duval 2012, 240-42). Ils sont allés parfois au-delà de la simple justification. L’affaire qui a clarifié le fait que la déprogrammation était illégale en Europe est la décision de la Cour européenne des droits de l’homme sur le cas Riera Blume et autres c. Espagne de 1999. La décision stipule clairement que Pro Juventud (plus tard AIS, Atención e Investigación de Socioadicciones), affiliée à la FECRIS, avait une « responsabilité directe et immédiate » dans la déprogrammation au cœur de l’affaire (Cour européenne des droits de l’homme 1999).
Là encore, il ne s’agit pas d’un incident isolé. En Suisse, des membres de l’affiliée local de la FECRIS, la SADK (Schweizerische Arbeitsgemeinschaft gegen destruktive Kulte), et de l’affilié britannique de la FECRIS, FAIR (plus tard le Family Survival Trust), ont été impliqués dans une tentative de déprogrammation en 1989 d’un membre du mouvement Hare Krishna, qui conduisit à des peines de prison avec sursis contre le déprogrammeur principal et les deux parents de la victime (Dericquebourg 2012, 192).
Encore en 2018, le programme de la réunion de la direction de la FECRIS du 1er juin à Riga, Lettonie, indiquait parmi les invités « David Clark, représentant de la FECRIS auprès des Nations Unies, New York ». David Clark était bien connu comme déprogrammeur (Shupe and Darnell 2006, 88, 98, 189).
- La FECRIS promeut activement une stratégie d’obstruction à l’encontre des chercheurs les plus chevronnés des nouveaux mouvements religieux, qualifiés d’ « apologistes des sectes ».
En 2018, l’universitaire américain William M. Ashcraft a publié un manuel faisant autorité sur l’histoire de l’étude académique des nouveaux mouvements religieux. Il y nota que ceux reconnus comme principaux spécialistes du sujet, dont les travaux ont façonné le domaine, étaient tous de sévères critiques de l’idéologie anti-sectes. Une poignée d’universitaires (dont le plus connu était le sociologue canadien Stephen A. Kent) ont fait sécession avec la majorité de leurs collègues pour créer une nouvelle discipline qu’ils ont appelée « études des sectes » (cultic studies) et non pas « étude des nouveaux mouvements religieux », qui acceptait la distinction entre les religions et les « sectes » et la théorie selon laquelle les « sectes » étaient identifiées par leur utilisation de lourdes techniques de manipulation psychologique pour lesquelles certains d’entre eux ont gardé le mot « lavage de cerveau ». Comme l’a noté Ashcraft, les « études des sectes » n’ont jamais été acceptées en tant que partie légitime de l’étude universitaire des religions. Elles ont continué en tant que « projet partagé par un petit cadre d’universitaires engagés », mais n’ont pas été approuvées par « la plus large communauté universitaire, au niveau national et international » (Ashcraft 2018, 9).
Bien que certains de ses représentants puissent occasionnellement publier des contributions intéressantes, Ashcraft a écrit que « les études des sectes ne sont [sic] pas un courant légitimé » (Ashcraft 2018, 9). La FECRIS, cependant, s’est constamment engagée dans ce que les sociologues appellent le gatekeeping (contrôle d’accès), c’est-à-dire une pratique consistant à « fermer les portes » en essayant d’empêcher certains livres ou auteurs d’exercer une influence sociale. Assurément, la FECRIS n’a aucune influence sur les revues et presses universitaires où les chercheurs qu’elle qualifie d’ « apologistes des sectes » continuent de publier régulièrement et dominent même le domaine. Cependant, elle promeut auprès des médias et de certains politiciens un faux récit, inversant ce qu’Ashcraft décrit dans son manuel sur le consensus académique. Alors qu’Ashcraft a noté que les « études sur les nouveaux mouvements religieux », qui sont « anti-anti-sectes », représentent l’opinion majoritaire dans le monde universitaire, et que les « études sur les sectes » sont considérées au mieux comme « périphériques », la FECRIS essaie de donner l’impression que c’est le contraire qui est vrai, que la petite minorité d’universitaires spécialisés dans les études sur les sectes sont les vrais « experts universitaires », tandis que les universitaires étudiant le domaine des nouveaux mouvements religieux sont un groupe d’ « apologistes des sectes » dont les travaux ne devraient pas être pris en compte par les gouvernements et les médias.
La FECRIS promeut également la théorie tout aussi fausse selon laquelle les spécialistes des nouveaux mouvements religieux considèrent que chaque groupe qui se prétend religieux est par définition innocent de tout crime dont il peut être accusé. Cela n’est évidemment pas vrai. Pratiquement tous les spécialistes des nouveaux mouvements religieux reconnaissent l’existence de « mouvements religieux criminels », tant parmi les religions nouvellement établies qu’au sein des anciennes religions (comme les réseaux de prêtres catholiques pédophiles ou les organisations terroristes qui prétendent agir au nom de l’islam). Seulement, ils font référence à des groupes commettant des crimes réels, tels que le terrorisme, la violence physique et les abus sexuels, plutôt que des crimes imaginaires consistant à « être une secte » ou à « utiliser le lavage de cerveau ».
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Diffusion de fausses informations sur les organisations religieuses et les chercheurs, discours de haine, soutien aux régimes totalitaires et à la violence physique contre les membres des « sectes », diffamation : il s’agit là d’un comportement qui justifie l’évaluation par l’USCIRF de la FECRIS comme un danger important pour la liberté religieuse internationale. Les institutions gouvernementales et autres qui coopèrent avec la FECRIS devraient sérieusement se demander si une telle organisation mérite vraiment leur soutien.
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